Trois fragments de La Ville dont la cape était rouge
Ce livre a été publié en 1998 en Turquie, puis en France en 2003, aux éditions
Actes Sud. Le début de l’histoire peut se résumer ainsi : Ozgür, une étudiante
istanbouliote, arrive un jour à Rio en pensant loger chez un universitaire. Un taxi la
conduit à l’adresse indiquée, où, malheureusement, on ne l’attend pas. Seule dans
cette ville débordante de sensualité mais aussi de terreurs, elle décide de rester.
« Elle avait croisé la mort à chaque coin ; une mort engraissée, vorace, capricieuse
s’était infiltrée dans chaque mot qu’elle avait écrit. Pourtant, ce qu’elle pourchassait dans
les labyrinthes sombres, c’était autre chose. Ce qu’elle cherchait dans les favelas
misérables, dans les regards voilés des sans—abri, au—delà des masques de carnaval... La
passion désespérée du corps pour la vie, plus vieille et plus puissante que tous les mots. »
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« Au début, elle s’était réfugiée dans la littérature, son amie de toujours ; elle avait
cherché un écrivain qui puisse éclairer la nuit qui régnait en elle et qui devenait de plus en
plus profonde. »
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« Un écrivain avait dit : « Pour connaître l’homme, il faut aller loin. » Ce n’est
qu’après être allée si loin qu’elle en savait plus sur les Latinos : « No ire foras... » (Ne va
pas dans le lointain, la réalité est au fond de toi.) Il fallait peut—être franchir l’enfer pour
pouvoir renaître, traverser les tropiques dangereux, infernaux, tristes...
Elle avait rejeté « le monde » qu’on lui avait offert : elle avait rassemblé toutes ses
forces dans un seul but. Attraper Rio de ses mains, comme un papillon, et l’enfermer dans
ses propres mots sans la tuer. La Ville dont la cape est rouge était née.
Asli Erdoðan, La Ville dont la cape est rouge,
traduit du turc par Esin Soyal—Dauvergne, Actes Sud, 2003
http://www.kedistan.net/wp—content/uploads/2016/11/Asli—Erdogan—recueil—2.pdf
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